vendredi 9 octobre 2009

Elie Bédé Sieur de la Gourmandière et des Fougerais. Familles bede, bedee.


Armoiries de la famille BEDE
*
Il est parfois des trésors, cachés sous la viorne sauvage qui protège les vieilles maisons. Enlacés par les rames tortueuses, les vieux murs rendent parfois les armes et se laissent pénétrer par les vrilles inquisitoriales. Elles peuvent alors mettre à jour quelques pièces d'or, un pistolet à chien, un vase précieux ou des secrets de famille.
Je me suis récemment penché sur une vieille ferme de mon village. Mon investissement ne fut que virtuel et nul espoir de récompense ne me motivait autre que l'assouvissement de mon illégitime curiosité.
J'ai soulevé le toit délicatement en essayant de ne pas déranger les actuels propriétaires, fort occupés à assembler quelques bouquets de roses fraichement cueillies. Les roses de la Gourmandière, cultivées à l'ancienne sous une grande serre, peinent à faire vivre ces courageux horticulteurs, en butte aux importations de fleurs d'Afrique du sud ou autres contrées néo-esclavagistes. Via la Hollande, toutes ces fleurs, récoltées dans des pays sans besoin de chauffage, par des ouvriers sous payés, tuent peu à peu nos artisanats locaux.
En vieux rat d'archives numérisées, je me fis furtif et fouillai avec pugnacité la toile d'araignée dite web, à la recherche de plus anciens locataires de cette terre de la Gourmandière.
J'ai la faiblesse de croire que toute maison ancienne recèle des secrets captivants et, encore une fois, je ne fus pas déçu.
Un peu de toponymie pour commencer. C'est une science parfois hasardeuse mais tellement amusante. En fait, je pense que la Gourmandière doit son nom à un nommé Guyon Gommont, propriétaire dans les années 1400 de ces mêmes lieux alors nommés "La Gommonière". La sémantique évolua par la suite vers "La Gourmondière" puis vers "La Gourmandière".
Passons sur les différents seigneurs, propriétaires successifs de ce fief et qui en faisaient parfois aveu aux religieux de l'abbaye de Bellebranche, encore debout de nos jours dans les bois de Saint Brice, en Mayenne. Le terme « aveu » (du latin advocare, appeler ou avoir recours) désignait, à l'époque féodale, l'acte par lequel le serviteur reconnaissait son maître et le maître son serviteur.
Comprenne qui pourra...
Passons aux surprises:
En 1618, un certain Jean Bedé, écuyer, avocat au parlement de Paris, est l'heureux propriétaire des lieux.
Je me penche et ramasse ce fil.
Jean Bedé est un protestant huguenot. En 1618 c'est encore relativement calme pour ces protestants "européens" mais, cela ne va pas tarder à chauffer pour eux (dans tous les sens du terme d'ailleurs). Louvois, dans une soixantaine d'année va envoyer ses dragons étriper ces braves gens et les accrocher aux gibets. Pour l'instant ça se chamaille, sans plus.
En 1675, un certain Charles Bedé, toujours huguenot, chevalier, conseiller du roi, marêchal de bataille en ses armées, gouverneur des ville et citadelle de Saverne, seigneur des Fougerais de la haute-Cuve et de la Gourmandière rend toujours aveu à l'abbaye de bellebranche.
Tiens, tiens.
Bizarre, vous avez dit bizarre.
Le fil qu'il faut ramasser maintenant est ...... Fougerais. Il y faut un certain flair et beaucoup de pôt.
Sur le web, il y a des moteurs de recherche, sinon cela ne servirait à rien.
Et voila ce qu'on y trouve:
"Le membre le plus connu de cette famille est un personnage médiocrement estimé, Elie Bedé, qui changea son nom en Beda puis en des Fougerais, nom d'une terre qui lui appartenait."
Et bien ce Fougerais n'est autre que le Desfonandrés de la pièce de Molière "L'Amour Médecin".

Molière s'est inspiré de ce médecin un peu charlatan, dévoué à Madame, épouse du roi, pour camper un médecin ridicule. Desfonandrés signifie "Tueur d'hommes".
Les protestants eux mêmes s'acharnent sur le dit Elie, converti au catholicisme, avec éclat, en 1648 . Ils écrivent: "Ses thèses ridicules, la censure que provoqua contre lui la Faculté, à cause de son charlatanisme,les graves accusations qu'a publiées Bussy-Rabutin contre ce médecin, achèvent de rendre peu regrettable, pour notre église, la perte qu'elle fit en sa personne." (Sympa non?)
Bon, nous sommes au bout de l'écheveau. Je ne sais pas si vous avez aimé suivre avec moi cette piste. Personnellement, je trouve cela captivant. Vous soulevez le toit d'une vieille maison voisine, vous y débusquez de vieux fantômes tout poussiéreux et vous parvenez à assoir, à la même table, des horticulteurs, des huguenots, des avocats, des médecins et Molière.


Molière

Bon je sais, dans KOH LANTA ils arrivent à rassembler des beaufs, des couillons, des imbéciles et des effeuilleuses et c'est sans doute plus captivant.
Je n'ai pas ça sous la main.
Désolé!

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